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LA CHARPENTE DU RECITx

La charpente du recitLa charpente du recit (51.5 Ko)

« LA CHARPENTE DU RÉCIT » -

COMMENT ÉCRIRE DE LA FICTION ?

(Christophe Lambert) – Argyll – 2023

Les éditions Argyll proposent une série de « manuels » permettant de guider les apprentis auteurs dans l’écriture de fiction. La collection est intitulée « Comment écrire de la fiction » et comprend six volumes (appelés « chapitres »). À ce jour trois ont déjà paru : « Rêver, construire, terminer ses histoires »  (L Davoust), « Devenir artisan de ses histoires «  (Damon Khnigt), « La charpente du récit » (Ch. Lambert), « Écrire, travailler au sein d’un cercle littéraire » (collectif) et deux sont à paraitre : « Trouver, développer et maitriser son style » (E. Faye) « Bâtir sa fabrique à histoires » (L. Davoust ».

Christophe Lambert propose de présenter une structure typique de récit (probablement la plus fréquente), structure « tri partite » qu’on peut résumer de la manière suivante : « un problème se pose », « on essaie de la résoudre », « on arrive (ou pas) à la résolution » (plus mutinement il résume également cette structure par « un début, un milieu, une fin »). Ces parties occupent respectivement environ 25%, 50% et 25% du récit. L’auteur ne se limite pas aux seuls romans et donne un grand nombre d’exemples tirés d’œuvres diverses (romans, contes, films, BD, séries télévisées,…). Ces conseils, ainsi que tous ceux qu’il donne par la suite, ne constituent évidement pas des formules toutes faites à appliquer absolument. Il ne s’agit que de repères avec lesquelles on peut jouer.

L’ACTE 1

Dans la première partie du récit (« l’acte 1 ») il s’agit de présenter les personnages et la situation donnée (ou le contexte), sachant qu’on peut présenter les personnages avant le contexte ou choisir de faire l’inverse. Les personnages seront complexes et donc victimes d’une « faille » psychologique ou morale. Le personnage peut être conscient de cette faille ou s’en rendre compte au cours du récit (en général au cours du troisième acte). Il est bon que cette faille fasse écho aux thèmes de l’histoire. Les personnages « négatifs » peuvent être munis d’un « potentiel d’humanité » de façon à les rendre complexes. Une faille psychologique peut prendre la forme d’un « fantôme intérieur » (ou « ghost », en général lié à un traumatisme passé).

Lambert donne ensuite une galerie de personnages « typiques ». Le plus important est « l’ange voyageur » celui qui pousse au changement qui peut être positif mais également négatif (à l’exemple du monstre, de l’invasion extra terrestre, au harceleur,…). L’auteur ne l’indique pas mais on pensera à « l’ange » du film « Théorème » de Pasolini. L’auteur liste ensuite une série d’archétypes utilisables : l’antagoniste, le mentor (figure du père, indissociable des romans d’initiation), le « rookie » (recrue ou disciple), le « buddy » (conseiller ou meilleur ami), l’ange gardien (en général à mobilité réduite ou nulle), le duo querelleur et/ou comique, l’allié ambivalent (qui trahit volontairement ou non). Il donne  ensuite une autre série de protagonistes « intra diégétiques » : l’orphelin, le chercheur de vérité, le guerrier, etc…

L’acte 1 permet également de mettre l’environnement ou le contexte en place dont les détails doivent être proposés avec parcimonie (conseil donné également par Stephen King[1]). Il faut également mettre en place les enjeux dramatiques ou « objectifs ». Ceux-ci peuvent être internes (le « ghost ») ou externe (« la mission ») et l’objectif externe doit de préférence être amené durant la scène d’ouverture ou, au plus tard, à la fin de l’acte 1.

Doit être ensuite envisagé le thème (ou la « question centrale ») qui peut être d’ordre individuel, sociétal ou existentiel. Les principaux personnages et protagonistes doivent être envisagés comme des réponses à cette « question centrale ».

Il faut enclencher cet acte 1 par un prologue. Celui-ci peut prendre différentes formes : ça peut être une « accroche » (une bagarre par exemple), il peut être informatif, prendre la forme de flash back, être un « prologue traumatisme ». Il peut également relever du rêve ou de la vie quotidienne.

Également importante, la gestion des informations qu’on livre au récepteur (lecteur, spectateur,…). L’auteur propose de distinguer la « surprise » du « suspens » : avec la surprise le récepteur découvre soudainement l’évènement. Avec le suspense, il sait que cet évènement va se produire mais ne sait ni quand ni comment. Il faut donc gérer les informations reçues par le récepteur mais également celles que reçoivent les personnages. De là peut naitre l’ « ironie dramatique » c'est-à-dire la situation où le récepteur en sait plus que les personnages. Lambert distingue trois formes d’ironie dramatique : la diégétique quand le lecteur en sait plus que les héros ; l’ironie culturelle qu’on trouve dans le cas de la présentation d’un fait connu de tous ; l’ironie contextuelle où le récepteur comprend avant le personnage ce qui va arriver car il maitrise les codes du genre (Wes Craven joue beaucoup avec celle-ci dans « scream 1 »).

L’auteur insiste également sur l’importance des « implants » c'est-à-dire des détails ou éléments introduits à un moment du récit et qui réapparaitront plus tard dans toute leur importance. Il est possible que ces implants soient « invisibles » c’est à dire qu’on n’en perçoive pas l’importance ou le rôle.

En résumé, l’acte 1 commence avec un élément déclencheur qui demande une réaction de la part du héros. Vers la fin de l’acte 1 on trouve un premier « point pivot ». L’auteur désigne ainsi l’évènement ou l’incident qui modifie (une première fois) le cours de l’histoire. Enfin, pour passer de l’acte 1 à l’acte 2 il faudra souvent affronter un « gardien du seuil » correspondant à un affrontement physique, moral, psychologique, artistique,….

L’ACTE 2

C’est le moment où les différents « nœuds dramatiques » vont se rejoindre et où l’histoire va sembler vraiment décoller. Cet acte 2 occupe environ la moitié de l’ensemble du récit.

Quatre ou cinq étapes importantes constituent cet acte 2. L’étape du « monde extraordinaire » est caractérisée par des changements importants, changement dans l’environnement ou changements internes ou externes touchant le personnage. Vient ensuite l’étape du « fun and games » qui est le moment où le héros sort de sa zone de confort et où il accumule les maladresses (mais le registre comique n’est pas obligatoire). C’est également l’étape où le héros commence ses préparatifs en vue de l’aventure. Puis au milieu de l’acte 2 arrive « l’étape de non retour ». Il ne lui est alors pas possible de faire machine arrière, l’aventure est devenue inéluctable. Il s’agit selon l’auteur d’un « point pivot » de l’histoire.

Enfin, le héros doit souvent faire face à un  premier défi, affronter les ténèbres ou faire face à un rêve, parcourir des souterrains et des égouts,… Ce que l’auteur nomme « le ventre de la baleine » (par allusion à Jonas). Egalement vers le milieu de l’acte 2 on trouve l’étape de la « parenthèse enchantée » ; étape de repos qui sera caractérisée par un rappel mélancolique du passé ou un aperçu optimiste du futur. C’est l’étape qui donne un peu de respiration au récit.

Le deuxième « point pivot » du récit permet de passer de l’acte 2 à l’acte 3. Il peut être négatif (un coup dur, le héros est tenté de tout abandonner) ou bien positif (le héros a une illumination ou ne prise de conscience)

L’ACTE 3

L’acte 3 occupe environ 25% du récit (comme l’acte 2). Il s’ouvre avec le deuxième point pivot : la confrontation finale approche et il faut prendre le temps de présenter cette préparation de façon à aboutir au « climax » (l’affrontement final).

On peut arrêter le récit à la fin du « climax » (« apothéose ») mais on peut également choisir de faire un épilogue avec un « sas de décompression » entre le climax et l’épilogue. Cet épilogue peut prendre diverses allures : le héros revient à son état premier ou bien la communauté cicatrise ses plaies. On peut opter pour une « fin à tiroirs » c'est-à-dire présenter les fins particulières de divers protagonistes. On peut choisir une « fin ouverte » (on ne sait pas ce que sera la suite) ou un « éternel recommencement » (par exemple, le personnage négatif reviendra)

Charpente du recit structure

A la suite de ces divers conseils (où il donne à chaque fois des exemples tirés de films, livres, etc…) Ch. Lambert propose de décrypter quelques histoires (films, romans, BD, pièces de théâtre) selon le schéma tripartite y compris deux textes dits d’auteur. Il présente également quelques œuvres « hors des clous » qui ne suivent pas tout à fait ce schéma. Enfin il montre qu’on peut retrouver ce schéma à divers niveaux : soit au niveau d’un extrait d’œuvre (chapitre de livre, scène de film,…) soit au niveau d’un ensemble (triptyque du seigneur des anneaux, saison de série (« downtown abbey » ou Buffy).

 

[1] Stephen King. « ÉCRITURE – Mémoires d’un métier » - Albin Michel – 2001

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